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Le polar du mois : Enquête sur la disparition d'Emilie Brunet, Antoine Bello, Gallimard.

Virtuose !

L'histoire est un cas d'école : Dans une petite ville de province, une jeune femme riche et mal mariée disparait avec son amant. Son mari, neurologue brillant et don juan patenté, est le suspect principal. Le flic qui mène l'enquête, Achille Nadot,  souffre d'une perte de mémoire temporaire qui l'oblige à noter le contenu de ses journées dans un cahier. Nous lisons ce cahier et menons l'enquête avec lui. Celle-ci s'avère très vite être une réflexion passionnante sur le crime parfait. Existe-t-il ? Comment peut-on le commettre ? Comment être certain de ne pas être confondu ? Le mari supposé coupable sert d'exemple et joue au chat et à la souris avec Achille. L'inspecteur est persuadé qu'il est le meutrier mais comment le piéger ? Un petit flic de garde l'a tabassé en vain au commissariat. Bavure qui ne sert qu'à nous démontrer que si l'homme ne parle pas, impossible de le confondre. Pour étayer son raisonnement (et le nôtre) l'inspecteur, passionné par la romancière Agatha Christie, utilise ses personnages et ses intrigues. Nous revisitons avec joie les meilleurs  romans de la grande dame du polar : la mystérieuse affaire de styles, le meurtre de Roger Ackroyd, un couteau sur la nuque, etc. En soulignant les astuces et techniques de la célèbre romancière, l'auteur nous expose mine de rien l'art et la manière d'écrire un polar. Le cahier du policier amnésique devenant en quelque sorte notre manuscrit. Le nom même d'Achille Nadot n'évoque-t-il pas celui d'Hercule Poirot ? Peu importe finalement de savoir qui a tué Emilie Brunet. Nous voilà embarqué dans une étonnante aventure de fin limier : comment trouver les indices pour coincer cet arrogant personnage qu'est son mari ? Roman policier hors norme, brillant, passionnant et so exciting...

J'ai adoré : Le bel hommage intelligent rendu à la meilleure des romancières de polar, Agatha Christie, que tout le monde pille et copie sans jamais lui dire merci. A la fin du bouquin on a qu'une envie, se replonger dans les enquêtes de ce bon vieux Hercule Poirot avec un éclairage nouveau. Merci Monsieur Bello !

Enquête sur la disparition D'Emile Brunet, Antoine Bello, Gallimard. 256 p 17,50 €. En vente sur mon blog.    

Antoine Bello est un fin romancier auteur notamment des romans Les falsificateurs (2007) et les éclaireurs (2009, Prix France Culture Télérama 2009). Moi j'ai adoré Eloge de la pièce manquante (1998). 

Féroces, Robert Goolrick, Anne Carrière.

Drôle et cruel !

Dans les années 50 dans la petite bourgeoisie de Virginie l'important est de faire "comme si". Il faut paraître aisés, heureux, bien dans sa peau et dans sa vie. Les dames sont bien coiffées, souriantes et sprituelles, les messieurs crânent et préparent des tas de cocktails colorés aux noms déments dont tout le monde s'ennivre pour rire haut et fort. Le bonheur et la réussite s'affichent à outrance. Peu importe si la réalité est autre. L'auteur est né dans une de ces familles. Harmonie en façade et détresse en coulisse. Fins de mois difficiles, disputes violentes, alcoolisme et larmes colorent l'enfance de l'auteur, ainsi que celles de son frère et de sa soeur, d'une teinte sombre indélébile. Tous les trois seront marqués à vie par ces années que l'on ne peut qualifier d'innocentes. Le plus touché sera le jeune Robert dont on découvre le drame terrible à la fin du roman. Ce récit autobiographique, plein d'humour et de légèreté grave, touche profondément par la simplicité, la beauté et la sincérité de l'écriture. On rit beaucoup, la plume est trempée dans une ironie mordante et l'auteur se moque sans retenue de cette famille fausse à l'extrème. Mais il n'arrive cependant pas à cacher une tendresse évidente pour sa mère, même si... A lire absolument pour s'indigner sur l'existence de certains sordides secrets de famille et pour réaliser que notre famille n'est pas si moche que ça, après tout.

J'ai adoré : La peinture au vitriol de la société bourgeoise américaine des années 50 avec le désespoir et l'ennui qui teintent les journées des femmes au foyer et le désir de perfection ridicule de ces hommes qui vivent dans l'angoisse de l'échec. La drôlerie de certaines scènes et le choc de la fin à laquelle on ne s'attend pas du tout et qui laisse muet de stupeur.

Féroces, Robert Goolrick, Anne carrière. 256 p 20,50 €. En vente sur mon blog.

   

Et vous, faites-vous semblant d'exister ? Jean François Duval, PUF.

Essentiel !  

Petite philosophie du quotidien à appliquer à la lettre. Voici un nouveau "carpe diem" sensible, intelligent et souriant. De sa plume séduisante et faussement légère, l'auteur nous invite à poser un autre regard sur les mille détails les plus banals de notre quotidien. La richesse de la vie dépend en effet de la manière dont on voit les choses, encore faut-il "bien" regarder. Le livre se compose d'une série de petites chroniques qui se lisent facilement et avec un plaisir fou. Le message : Dans un monde de plus en plus culpabilisant il est totalement urgent de devenir plus indulgent à notre égard. La phrase clef: " Il faut réaliser une bonne fois pour toute que demain ne nous apportera rien qu'aujourd'hui ne nous ai déjà offert". Poésie méditative sur la vie d'aujourd'hui et art du vagabondage littéraire voisinent dans ces savoureuses pages à dévorer sans modération. La préface est signée par le génial et facétieux Denis Grozdanovitch et vaut la lecture. Mes chroniques préférées : Mr Sénèque et Doct Prozac; Avec le temps je me décante; Tu m'étonnes... A offrir à ceux que l'on aime et à soi même d'abord et d'urgence !

Et vous, faites-vous semblant d'exister ? Jean François Duval, PUF. 216 p, 17 €. En vente sur mon blog.

Jean-François Duval a publié plusieurs romans dont le super Boston Blues (Phébus 2000) et un passionnant essai sur la Beat génération (1998 Michalon).  

DEUX PETITS LIVRES CADEAUX RIGOLOS ET PAS CHERS.

A offrir et à s'offrir pour garder le sourire toute l'année et éviter de se prendre trop au sérieux. Ces deux petits bouquins s'amusent de rien, de nous, du temps et des autres. Humour bon enfant, jeux de mots parfois un peu gros mais jamais méchant. Ils nous font jouer avec les mots et  la langue française. A consommer sans modération.

Mauvais esprit génial !

Ce délicieux petit livre invite à l'autodérision. Il répertorie et commente, avec justesse et malice, les comportements typiques, drôles, agaçants, parfois grotesques  des parisiens (et parisiennes). Mauvais esprit et bons mots au programme. Evidemment, il s'agit du parisien aisé, branché, léger. Classés par thématique : le jean, la San Pé, Le Monde, etc. l'auteur (un parisien aisé, branché et léger) livre ses conseils pour "parler parisien". Exemple : les chaussettes blanches. Conseil utile "si vous venez à Paris évitez les chaussettes blanches".  En parler parisien cela donne "Non enfin le mec, chaussettes blanches, manches courtes, la totale quoi, l'enfer". Oui c'est futile, très parisien bobo chic et donc, indispensable.

Dessine-moi un parisien, Olivier Magny, 10X18, 218 p 12,50 €.

 

Humour franchouillard de haute volée ! 

Humour potache typiquement français. On ne peut pas s'empêcher de rire ou sourire en lisant la sélection de 450 pensées et réclames folles de Auguste Derrière. Ce "grand penseur",  né en 1891, fut le roi de l'absurde, des nons sens et du jeu de mots. Concepteur de réclames mariant l'ironie comme personne, il a connu un vif succès et publié de nombreux ouvrages de son temps avant de sombrer dans l'oubli. Le voici de nouveau à l'honneur avec ce délirant petit recueil regroupant une sélection de maximes, dictons, blagues et aphorismes du maître du rire français. Quelques exemples : "Que fais-tu lorsqu'une tarte t'atteint ?" ou "Mieux vaut être belle et rebelle que moche et remoche" ou encore "Celeri qui mal y pense".Idiot oui mais, irrésistible.

Les moustiques n'aiment pas les aplaudissements, Auguste Derrière, 150 p 12,90 €, Castor Astral.

En vente sur mon blog.

BEAU LIVRE : André Gide, Album de famille, Jean-Pierre Prévost, Gallimard.

Le sulfureux André Gide a eu beau dénoncer la vie de famille comme un calvaire à éviter absolument ("Familles je vous hais", c'est de lui !) il n'en a pas moins vécu en famille et... Heureux. Pour preuve les 100 photos presque toutes inédites réunies dans ce bel album et qui nous montre l'écrivain entouré de ceux qu'il aime. Evidemment, il n'avait pas une famille très conventionnelle. Son épouse Madeleine était sa cousine et si leur amour fut uniquement intellectuel il sera néanmoins très passionnel et donc compliqué. André Gide gardera toute sa vie un attachement inconditionnel pour Madeleine. Ce qui ne l'empêchera pas de tomber amoureux de jeunes gens comme  Marc Allégret (le futur cinéaste) ni de lier une amitié  sans faille avec Maria, la femme d'un peintre Belge Théo Van Ruysselberghe. Admiratrice inconditionnelle, elle partagera son quotidien et elle tiendra des carnets précis sur tout ce que fait Gide et tout ce qu'il dit. Outil précieux pour les biographes. Mais c'est avec la fille de Maria, la jeune Elisabeth, qu'il aura une fille en 1923. Il attendra la mort de Madeleine pour reconnaître sa fille Catherine. Cette famille étrange composée de Maria et de son mari Théo, d'Elisabeth, de Catherine et de Marc Allégret va partager l'appartement du 6è arrondissement d'André Gide pendant de nombreuses années. Madeleine y aura sa chambre mais préfèrera vivre dans sa Normandie natale loin de ce mari si peu conforme à ses attentes et à son milieu. Surprenant, amusant et touchant, cet album de famille éclaire le profil de l'écrivain d'une lumière nouvelle. Le voir en papa attentionné et affectueux étonne et séduit. Le découvrir  avec pour meilleur ami et confident une femme, encore plus. André Gide a créé sa tribu, à son image. Il n'a pas été l'égoïste solitaire que l'on a coûtume de nous présenter. Cet album, nostalgique à souhait, souligne combien la famille a du bon, même quand elle n'est pas très conforme à la morale. A offrir par ces temps de grand bazar.

Un intéressant DVD accompagne l'album photos commenté par Catherine Gide. Et puis on lit, ou relit, "la symphonie pastorale" qui traite du conflit entre morale religieuse et sentiments amoureux et qui n'a pas pris une ride. 

Album de famille, André Gide, Gallimard, 185 p 35 €. En vente sur mon blog.

 

BEAU LIVRE : Romain Gary, Miriam Anissinov,Textuel

A offrir pour les fêtes à ceux qui aiment Romain Gary et à ceux qui ne le connaissent pas encore. Trente ans après sa disparition, ce très beau livre regroupe des archives intimes et inédites sur  l'écrivain bouleversant et l'homme en perpétuelle quête d'identité. Qui était véritablement Romain Gary ? Il n'a cessé de se poser lui-même cette question depuis la Wilno de son enfance à ses missions pendant la guerre et au Paris de tous les succès et amours. Tour à tour aviateur, diplomate, écrivain, Romain Gary n'a cessé de s'inventer. Il a changé de prénom, de nom, il a pris différents pseudos après s'être créé plusieurs pères fictifs. Pour beaucoup il demeure le provocateur qui s'est joué du monde littéraire en se faisant attribuer deux fois le prix Goncourt, dont une sous le pseudo d'Emile Ajar. On retient son oeuvre profonde, humaine, sensible, que ce magnifique livre exhalte. On se régale de ces pages passionnantes, illustrées avec trois cent repro en bichromie, qui rendent l'artiste plus proche, moins énigmatique. Et ensuite on lit, ou relit, "la promesse de l'aube" et "les racines du ciel" parce que simplement géant.

Romain Gary, Miriam Anissinov, éditions Textuel. 192 p 49 €. En vente sur mon blog.

Miriam Anissinov, auteur, a personnellement connu Romain Gary. Elle a publié la seule bio qui fait référence sur l'écrivain  "Romain Gary, le caméléon" (Denoël 2004).   

Les frères Rattaire, Philippe Langieux-Villard, Héloïse d'Ormesson.

Incroyable mais vrai !

Ils étaient trois frères: Honoré, Alfred et Louis. Trois garçons d'à peine vingt ans, fils d'un instituteur savoyard, tous les trois morts dans la boue, le froid et la pluie des tranchées de la Grande Guerre. Et pourtant leur nom n'a pas trouvé sa place sur le monument aux morts. Leur père, Adolphe, est instituteur et secrétaire de la mairie du Moutaret, petit village de Savoie de cinq cent âmes. Il les regarde partir au début de la guerre, chacun à leur tour, fier et certain de la victoire. Dans la famille on est instituteur de père en fils, éducateur passionné et ferveur catholique. Adolphe sera en plus un patriote zélé. La mort de ses trois fils au front va le dévaster mais l'honneur de leur sacrifice sera sa seule consolation. Or après guerre, à l'heure où la France pleure et glorifie ses morts, le nom des trois frères Rattaire ne figure pas sur le monument aux morts du village. Pourquoi un tel affront à la famille, qui est à l'origine de cet "oubli" ? Ce texte court retrace avec sensibilité et vivacité l'histoire de ce scandale oublié dans les lendemains de guerre. La plume est superbe de simplicité et retenue. Le souci de justice et l'indignation percent sans jamais sombrer dans le réquisitoire. Une occasion formidable de plonger dans la France profonde de ces années là où la mesquinerie et la bêtise battaient leur plein alors que d'autres se faisaient massacrer.  Edifiant.         

J'ai adoré : Le ton et l'écriture de ce document qui se lit comme un roman, la découverte de cette histoire inouïe qui montre jusqu'où peuvent aller les rivalités stupides de clocher, comment être certain que de telles choses ne se reproduiront pas ? En lisant ce petit bouquin intelligent et en l'offrant.

Philippe Langénieux-Villard fut député de l'Isère, il est conseiller régional Rhône-Alpes et maire d'Allevard-les-Bains (Isère), il est l'auteur de plusieurs essais et d'un roman (Le Livreur 2008). Emu par cette sordide histoire qu'il a découvert par hasard, il en a fait ce court document pour que le nom des frères Rattaire ne soit pas oublié tout à fait par l'Histoire.

Les Frères Rattaire, Philippe Langénieux-Villard, Eloïse d'Ormesson. 128 p, 15 €. En vente sur mon blog. 

Le polar du mois : Les larmes de diamant, Deborah Crombie, Albin Michel.

So british !

Londres dans les années 80. L'une des superbes créations de joaillerie art déco signée Jakob Goldshtein se fait remarquer dans le catalogue d'une prestigieuse salle de vente. Cette broche d'exception avait disparue depuis plus de cinquante ans. Sidérée Erika Rosenthal, fille du créateur, veut tout savoir : qui est le propriétaire de ce bijou ? Où était-il passé pendant toutes ces années ?  Pourquoi cette mise en vente ? Son père lui avait offert cette pièce unique quand elle s'est sauvée de l'allemagne nazie avec son mari. Elle croyait l'avoir définitivement perdue. La revoir fait surgir un passé douloureux dont la mort brutale et mystérieuse de David, son mari. Pour résoudre l'énigme, Erika demande l'aide de son amie Gemma inspecteur de police, mariée à un commissaire de Scotland Yard. Mais les secrets du beau bijou ne se livrent pas sans danger, les meurtres s'enchaînent étrangement. Cette innestimable pièce de collection porterait-elle malheur ?... Excellent polar dans la plus pure tradition des savoureuses enquêtes anglaises. Le roman est formidablement bien construit avec des allers et retours entre le présent et le passé. On évolue dans la hight sociéty anglaise des années 30 qui fleurtait dangeureusement avec les idées d'Hitler, dans celle menaçante de Berlin, et dans le Londres chic et futile d'aujourd'hui. Menée sur un ton vif et efficace, l'enquête enchante et captive. Réussite totale.

J'ai adoré : le couple d'enquêteurs qui s'aiment en bossant tout le temps, les virées dans les rues de Londres, l'évocation du passé à travers un objet "maléfique", l'enquête style Agatha Christie où l'on croit tout deviner avant la fin.

Traduit de l'anglais (américain) par Nicole Hibert.   

Les larmes de diamant, Deborah Crombie, Albin Michel.

352 p 19,50 €. En vente sur mon blog.

 

BRAVO !!! HAROLD COBERT RECOIT LE PRIX DU STYLE 2010

Son roman "L'entrevue de Saint-Cloud" (voir ma note du 27 septembre ) est un de mes coups de coeur de septembre. Sa plume simple et élégante a également été remarquée et distinguée par un des (nombreux) Prix Littéraires de cet automne : le Prix du Style.
Non seulement c'est super mérité mais cela fait plaisir pour lui. Il a été cité dans de nombreuses sélections. C'est tout de même bien qu'il reçoive un truc...

Le Prix du Style a été créé il y a six ans par le label littéraire Plume et Plomb. Il récompense la qualité stylistique d'un livre écrit par un auteur vivant, de langue française et paru dans l'année. Son fondateur est Antoine Bueno, écrivain. On peut se demander à cette occasion : mais que récompense donc les autres Prix Littéraires si ce n'est le style ? Il vaut mieux pas trop s'attarder sur les qualités d'écriture de certains romans primés. Cela fiche le moral en l'air. On se réjouit pour Harold Cobert et on retient son nom, il n'a pas fini de nous rendre heureux.

On lit donc, si ce n'est pas déjà fait, "L'entrevue de Saint-Cloud" (Héloïse d'Ormesson). Bref, séduisant et brillant roman. L'auteur imagine l'entretien ultra privé et historique entre la Reine Marie-Antoinette et Mirabeau quand celui-ci veut la convaincre qu'il n'y a que lui qui puisse sauver la monarchie. Comme elle ne peut pas le saquer, elle l'écoute d'une oreille méfiante mais elle l'écoute quand même. Savoureux dialogues qui nous font réfléchir aux destins étranges des nations. A lire absolument.

Harold Cobert a publié une thèse et un essai sur Mirabeau (c'est son dada!!) mais il a aussi écrit un délicat roman "Un hiver avec Beaudelaire". A lire aussi.

"L'entrevue de Saint-Cloud" est en vente sur mon blog.    

 

Satan Lake, Joanne & Gerry Dryansky, Actes Sud.

Douloureux !

Angie et Ross ont treize ans lors de cet été 1984. L'âge de tous les rêves. Ils vont pourtant vivre un cauchemar. C'est Angie qui raconte avec beaucoup d'humour, tendresse et désarroi. Tous les deux ont des parents "démissionnaires". Les parents d'Angie sont divorcés, le père drague les Lolitas et ne veut pas s'encombrer de sa fille, la mère mène une vie sexuelle dissipée qui va mal avec l'éducation d'une jeune fille. Du côté de Ross, sa mère se meurt d'un cancer, c'est Ross qui prend soin d'elle, le père est flic et dépassé par la douleur. Angie et Ross viennent de se rencontrer quand une série de meurtres sauvages terrorisent la petite ville paisible dans laquelle ils vivent. Malmenés dans leurs familles, fragilisés par le monde qui explose de violence autour d'eux, face à l'incapacité des adultes, Angie et Ross signent un pacte d'amitié à la vie à la mort qui va les conduire aux portes de la catastrophe. Roman terrible et terrifiant sur la violence faite aux adolescents en perte de repères. Récit conduit sur le ryhtme d'un excellent polar avec serial killer en action et angoisse passive de la bonne société. Les auteurs analysent avec efficacité les conséquences de l'incurie des adultes dans le monde d'aujourd'hui. Ils brossent aussi le portrait d'une middle classe américaine bien pensante et hypocrite qui refuse de voir le mal là où il frappe. Redoutable.   

J'ai adoré : les deux jeunes ados tellement plus mûrs, sensés et plus forts que les adultes. J'ai été impressionnée par le phénomène de contamination de la violence chez les jeunes et ses risques de débordement. Un roman intelligent qui fait réfléchir. 

Traduit de l'anglais (américain) par Estelle Dégez. 

Satan Lake, Joanne & gerry Dryansky, Actes Sud, 304 p, 22,50 € en vente sur mon blog : http://www.leslivresquejaime.net/